Où sont nos héros ?

La foule aux Champs Élysées lors de la finale du Mondial de football 2018, aquarelle de Nicolas DÜRR

 

Comme beaucoup de gens, j’aime le sport. Pas seulement en le regardant à la télévision, mais pour m’y adonner régulièrement dans plusieurs disciplines le plus souvent possible.

Donc, j’aime le football (sport d’équipe aux nombreuses vertus, qui, même si je ne le pratique plus, me rappelle les bons souvenirs de l’époque où je jouais défenseur dans l’équipe de mon lycée).

Et j’étais par conséquent très heureux de voir jouer notre équipe nationale hier au soir face à la Croatie, puis de la voir gagner (particulièrement lors de ses deux ou trois fulgurances se terminant par un but à son avantage, dont on aurait bien aimé entre nous soit dit, qu’elle nous donne par ailleurs d’autres exemples de ce type de jeu).

Je savoure ainsi sa victoire avec nombre d’entrevous, même si je ne suis pas pour grand-chose dans ce large succès, et n’en oubliant pas non plus le mérite et le talent de l’équipe croate  !

Mais hier au soir, en poursuivant ma soirée devant les images provenant des Champs Élysées et de l’Arc de Triomphe, tout en continuant de partager mentalement la liesse populaire, j’ai soudain pensé, en voyant le portrait des joueurs s’afficher sur l’illustre arcade, à mon grand-père maternel blessé lors de la bataille de la Marne en ce funeste mois de septembre 1914, puis décédé quelques mois plus tard de ses blessures après de terribles souffrances…

– Ainsi, ces jeunes gens (au talent indéniable que j’admire très sincèrement) seraient des héros (mots que j’ai entendu répéter plusieurs fois les concernant ce matin à la radio), au même titre que mon grand-père mort pour défendre sa patrie ?

– Et que penserait mon père, qui a plusieurs fois risqué la sienne (de vie) lors du dernier grand conflit mondial 1939 – 1945, en voyant l’emblématique édifice abritant la tombe du Soldat inconnu se revêtir d’attributs sportifs (tout aussi nobles et empreints de valeurs qu’ils soient), dont il pourrait se demander (même s’ils participent à « la gloire nationale »), à quel point on peut aujourd’hui tout mélanger et manquer de clairvoyance dans l’attribution de ses symboles, au milieu d’une liesse devenue confusion générale de ce qui était autrefois références d’un peuple dans sa lucidité face aux vertus essentielles liant sa mémoire à son identité nationale, et aux notions fondamentales de son existence ou de sa survie ?

Alors, bravo les Bleus, bravo Didier, mais tout en continuant de fêter la victoire de nos sympathiques footballeurs aux réelles et indiscutables qualités (cohésion et discipline, générosité et humanité, etc.), je prends un nécessaire recul, en anamnèse de ce que tous ceux de nos autres compatriotes exemplaires (jeunes ou moins jeunes, célèbres ou anonymes, connus et inconnus, valides ou handicapés, scientifiques ou sportifs – que vous soyez individuels ou en équipe, médecins, chercheurs, explorateurs, grands navigateurs, cyclistes, alpinistes émérites, sans oublier parmi vous les « spécialistes », les sauveteurs, ou les militaires dévoués à votre mission -, et vous aussi malades luttant pour votre survie – car vous avez également droit à de l’admiration -), vous tous, méritant autant pour un jour que définitivement le qualificatif de « héros », qui avez contribué à faire ce que nous sommes aujourd’hui collectivement et individuellement.

Je vous retrouve dans le prochain article, avec la réussite non pas sportive, mais culturelle, de l’exposition consacrée à l’œuvre de mon père, sur le beau site touristique de Bozouls !

22 Responses

  1. Jackie
    | Répondre

    Merci Alain, je partage totalement ton avis…Et suis ravie pour le sucrées de l’expo de ton père…

    • Alain-MARC
      | Répondre

      Je crois qu’il est important de redonner aux mots leur sens véritable et de remettre les choses à leur place, ce qui ne nous empêche pas de partager un bonheur collectif, lorsqu’il y en a un à partager !

  2. Chantal Dailly
    | Répondre

    Oui, Bravo , les Bleus !
    Bravo Monsieur Alain Marc pour votre aquarelle et bravo car vous avez par vos écrits, recadré et remis en conscience les vraies valeurs de la vie car si nous sommes libres aujourd’hui, il ne fait jamais oublier que c’est grâce à nos aïeux qui ont combattu et laissé leurs vies pour nous ! Eux sont des HEROS…qui méritent une place à l’Arc de Triomphe par rapport à des exploits sportifs !!!

    • Alain-MARC
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      Non Chantal, ce n’est pas mon aquarelle mais celle de Nicolas DÜRR (observateur carnettiste témoin de son temps dont je relais ici le très intéressant travail en renvoyant par lien à son billet), quant à mon opinion vis à vis de la mise en lumière de cette victoire, autant j’approuve son support sur la Tour Eiffel, autant je dis dans cet article ce que j’en pense par rapport à l’Arc de Triomphe de l’Étoile ! Merci beaucoup en tout cas, pour votre commentaire qui prouve que nous ne sommes pas que quelques-uns à penser un peu de la même façon…

    • Mon sentiment sur cette victoire est qu’elle est porteuse d’un rêve et qu’elle va contribuer à booster certainement les adhésions dans des clubs amateurs. Cependant, j’espère que nos bleus ne vont pas répéter les erreurs de leurs aînés d’il y a 20 ans, à savoir avoir plutôt tendance à s’endormir sur leurs lauriers, se focaliser sur les activités annexes que leur ont permis leur victoire, à savoir leur participation aux spots publicitaires, servir de faire valoir au grandes marques, etc… et réaliser une performance pitoyable au mondial suivant, comme ce fut le cas en 2002. A la fin de mon article, dont voici le lien (http://croqueurdenature.blog.lemonde.fr/2018/07/15/mondial-foot-2018/) j’illustre un peu cette idée avec une vidéo d’une publicité avec Guy Roux).

  3. annie
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    Bonjour
    Je suis de votre avis. Certes c’est un exploit sportif , mais il y a tant de héros anonymes , des temps passes qui ont souffert dans leur chair pour que la France soit et reste ce qu’elle est , ses valeurs , tant de héros présents qui se consacrent avec abnégation a leur travail , au prix d’efforts soutenus et quotidiens et dont on ne parle pas. Je trouve cette liesse et les vertus dont on pare ces footballeurs bien disproportionnées
    Annie

    • Alain-MARC
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      Comme quoi, il est parfois difficile de rester objectif, tant dans dans la liesse que la douleur !

  4. Adyne Gohy
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    Félicitations aux bleus et aussi au peintre qui a su transmettre dans sa peinture la liesse populaire !!
    Adyne

    • Alain-MARC
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      Oui, Nicolas est très observateur, et son aquarelle est aussi un témoignage que je me plais à relayer !

  5. pouponnot lydie
    | Répondre

    Je suis moi aussi complètement de ton avis.
    Je me suis d’ailleurs demandé si les jeunes toulousains qui, après la victoire des bleus se jetaient depuis le pont saint Pierre dans une Garonne tumultueuse , boueuse et bien sûr polluée étaient eux aussi des hëros??????
    Les mots ont encore un sens , ne l’oublions pas

    • Alain-MARC
      | Répondre

      Ton commentaire m’amuse beaucoup, mais il est le témoignage révélateur d’un aspect de notre société qui ne va pas toujours à son avantage ! Avec mes amitiés,

  6. Jauffroy
    | Répondre

    Bravo et merci Alain pour cette réaction que j’approuve sur toute la ligne, notamment sur la reconnaissance des mérites de l’adversaire et particulièrement sur cette « liesse devenue confusion générale ». On n’en attendait pas moins de toi ! Jeanne.

    • Alain-MARC
      | Répondre

      D’autant plus, que toi, à Paris, tu étais « aux avants postes » !

  7. micheline vaudenay
    | Répondre

    Tout à fait d’accord avec toi Alain.On confond tout et n’importe quoi et on attribue des mots à des actions sans savoir le véritable sens de ce mot. Autant on a peur de nommer un sourd, c’est un malentendant ou un aveugle, c’est un non voyant, autant un jeune homme en culottes courtes qui tape dans un ballon est traité de héros. Les valeurs sont chamboulées. Il est bon de remettre les choses à leur place. Mais
    « celui qui dit la vérité
    il sera exécuté..; »
    se rappeler aussi de cette chanson de Guy Béart je crois.
    Merci pour ton billet, il redonne de l’espoir.
    Micheline

    • Alain-MARC
      | Répondre

      Tu as raison Micheline, j’essaierai juste de ne pas être exécuté trop vite, car d’autres vérités à resituer, j’en ai encore quelques-unes sous le coude !

  8. Paule Sable
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    Ce texte parle vraiment merci

  9. Françoise ROBERT
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    C’est aussi l’inculture des médias qui relaient ce mot à tout va. Il n’ont qu’un letmotiv : faire de l’audience, peu importe si il y a méprise sur les mots (et au passage à l’information).
    J’ai moi aussi participé à cette liesse et observé (dans mon quartier) que les portes drapeaux étaient principalement une population métissée qui se sent bien bleu blanc rouge et le criaient haut et fort : ici c’est la France !!!!. Ceux qui veulent nous diviser feraient bien d’en prendre note

    • Alain-MARC
      | Répondre

      Très intéressant ce que tu dis, Françoise ! Une victoire, c’est un travail d’équipe, et dans une équipe on est tous différents mais on œuvre à l’unisson pour un but commun (comme dans notre société actuelle telle qu’elle devrait être idéalement, en faisant de chacune de ses différences un atout de ses richesses) . Ce qui compte ensuite, c’est que les mots utilisés pour qualifier chaque chose correspondent vraiment à ce qu’elles sont, et les médias ne jouent pas toujours là le rôle primordial qui devrait être le leur (par déjà l’exemple d’un bon usage de la langue française) dans le cadre de ce qui s’appelle « l’information » !

  10. Daniel
    | Répondre

    Cette coupe est un bel exemple d’hystérie collective, phénomène qui peut dans d’autres contextes amener les gens à marcher au pas de l’oie.
    Je suis malheureux, je n’arrive pas à m’exciter pour un match de foot. Je compense en allant voir et revoir les œuvres de ton père JEAN MARC à la galerie de Bozouls.
    Chacun son truc!

    • Alain-MARC
      | Répondre

      Je te comprends tout à fait, même si j’aime regarder un beau match et apprécier les performances sportives, techniques et tactiques qu’engage le jeu (dans tous les sports et pas seulement le foot), mais ce jeu n’est qu’un acte à la valeur éphémère, alors que celle de l’art est durable (tant que durent son support et son expression, sans compter l’enrichissement intérieur et culturel qu’on peut en retirer)… Pour le reste, tout à fait d’accord avec toi, mais c’est très difficile de prendre du recul et de « remettre les choses à leur place » quand on est dans un contexte qui ne te permet guère de les percevoir avec assez de discernement, surtout quand on est supporter !

  11. On emploie l’expression « Black blanc beur », pour indiquer qu’en France, chacun peut réussir quelque soit on origine. Cependant, dans beaucoup de secteurs de la vie économique, c’est loin d’être le cas. Et que dire de nos sorties et stages aquarelles. On es loin du compte. Je n’ai pas beaucoup vu de personnes dites « issues de l’immigration » dans les stages et sorties que j’ai faites.

  12. Petit
    | Répondre

    Tu as raison Alain: des héros il y en a tous les jours et très souvent inconnus. Je pense que cela ne méritait pas un tel battage.
    bisous. monique et andré.

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